dimanche 7 août 2011

Etape quatre : Tilcara

Après une dernière soirée merveilleuse avec la famille de Gonzalo et des aux revoirs au terminal de bus très difficiles, j'ai pris la route pour le grand nord argentin.

Les andes me sont apparues avec le soleil comme la récompense de ces semaines de voyage en solitaire. Elles sont enfin là, juste devant moi ces montagnes merveilleuses. Je reste bouche bée face a à la splendeur du paysage.
Une terre rouge striée de verre, violet et jaune, parsemée de grands arbres et d'immenses cactus. Dans le fond de la vallée un rio presque asseché coule entre des amas de pierres blanches. Il n'est pas rare de voir traverser une caravane de lamas où un troupeau de chèvres. Et puis il y a les montagnes, plissées, avec de grands pics qui se referment petit à petit sur vous jusqu'à vous engloutir. Le long de la route serpentueuse de nombreux petits pueblos, des niches avec la vierge marie, des gamins qui sortent de l'école une blouse blanche sur le dos, courant partout en attendant le bus....

Tilcara, où l'etoile filante en quechuya, 2500m d'altitudes, petits villages perchés en haut des montagnes, absolument magnifique,...je comprends tout de suite pourquoi la place du village est remplie de touristes....

Ce fut tres difficile au debut.
Si auparavant je passais un peu inapercue, ici c'est desormais impossible...la population n'est plus du tout la meme qu'auparavant, les peaux sont mates et brunies par le soleil, les cheveux et les yeux noirs. Alors avec ma peau blanche et mes cheveux roux je ne ressemble en rien au type andin, je suis bien une petite européenne, une touriste parmi tant d'autres. Les regards sont plus méfiants ou exasperés. Je crois que les locaux en ont marre d'etre envahis par cette foule de porteños ou europeens qui arrivent en quatre quatre, prennent quelques photos, achetent une flute de pan et s'en vont.
Je retrouve dans ce petit pueblo les questions du voyage qui me tourmentent tant : "qu'est ce que je suis venue chercher ici ? comment partager, échanger une culture avec des personnes qui n'ont jamais quittées leur village, qui ne pourront jamais quitter leur region ?  qu'est ce que je peux leurs apporter moi, petite europeenne au niveau de vie aisét voyageant chaque annee ? n'est ce pas ridicule tout cela, pourquoi je viens embeter ces gens qui vivent tranquilement ?"
Je voudrais leurs expliquer que jaimerais comprendre leur culture, decouvrir la maniere dont ils vivent, pourquoi leur situation n'evolue pas, connaitre leurs histoires...mais je ne peux pas m'empecher de me demander pourquoi ? la sale impression de venir prendre, voler des choses et de ne rien pouvoir apporter en echange....la culpabilité me tombe dessus...et pour la premiere fois de mon voyage je vais dormir à l'hotel (enfin une sorte de bed and breakfast) et n'ose pas aller affronter la différence. Je pense tout le temps à Santiago del Estero, à Gonzalo et Shelen, à Luz et Gaïa. Leur chaleur et curiosité me manquent et je ne peux m'empecher de comparer ce qui se passe ici à ce qui s'est passé làs bas...il m'aura fallu une enorme nuit de sommeil pour arriver à accepter que chaque etape est differente et apporte son lot de coups durs mais aussi de surprises et qu'il faut aller de l'avant, et surmonter l'angoisse de l'inconnu encore un peu plus.


Et finalement malgre les aleas de cette etape (je suis venue expres ce week-end ici pour pour pouvoir assister a la fete de la pachamama et j'apprends que c'est une ceremonie privee, impossible d'y acceder ; mon contact est injoignable...) les choses vont s'arranger d'elles memes.
Gràce à Maria rencontrée par couchsurfing, je decouvre "musica esperanza", un centre culturel où des cours de musiques sont donnés gratuitement pour les enfants, et qui agit pour la protection de la culture locale. Ravek y travaille. Il est sociologue et specialisé dans la musique andine, bref le contact indispensable qui repond a toutes mes questions et me guide dans ma recherche. Il m'informe d'une petite fète patronnale ce week-end où je pourrais ecouter de la musique andine.

Je me rends donc samedi soir dans le quartier escalinita, delaissé des touristes. En bas d'immenses escaliers, se trouve un petit groupe de jeunes jouant de la flute de pan, accompagnée de bombos et tambours. C'est une des musiques traditionnelles du coin,  l ínfluence andine remplace l influence espagnole.
Un grand feu crepite dans un coin et les mamies sont assises tout autours sans se decrocher un mot. Les jeunes filles font des allers retour sjusqu'à leur maison pour aller chercher des grandes cruches remplies de lait chaud avec de l'alcool, qu'elles distribuent à tout le monde. L'ambiance est assez etrange, je me sens toute petite, ne sais pas trop ce que je fais là et n'ose aller parler à personne.

Un petit vieux avec un grand chapeau de cow-boy s'approche de moi, et commence à me baragouiner quelque chose. Je ne comprends absolument rien. Je ne sais pas si c'est parce qu'il n'articule pas ou parce qu'il semble avoir bu trop de vin rouge mais j'ai beau faire des efforts aucun mot ne m'est familier. Il cherche à m'expliquer quelque chose avec ses mains, fait de drole de signes, une danse bizarre. J'ai l'impression qu'il commence à s'enerver et moi je commence à paniquer, je ne sais absolument pas ce qu'il me veut. Heureusement, voyant mon desemparement un autre petit papi à moitié chauve vient à ma rescousse et fait le traducteur. En fait il voulait juste m'expliquer que la peite fète etait en l'honneur d'un saint et que demain il y aurait une grande messe en son hommage: Et ses signes dans tous les sens etaient en realité une question sur mes croyances ! Je me sens un peu honteuse d'avoir tout de suite pensé qu'il me voulait du mal. Meme si c'est dur a reconnaitre et accepter que je crois que j'ai moi aussi au fond de moi un peu peur de cet endroit, il faut que j'arrive à depasser les premieres impressions. L'autre petit papi, Alberto de son petit nom, est absolument adorable. Il aime rencontrer des etrangers et veut toujours donner une bonne image de son pays. Alors il m'invite dans sa maison, ou sa cousine prepare une tarta. Il me parle de son village et de l'amour pour la terre et m'invite à revenir le lendemain.
Ce que je fis bien evidement. J'ai eu le droit d'assister à une grande messe en plein air à l'honneur de ce saint, ici tout le monde connait le pater noster, meme les gamins de cinq ans. Apres il y a eu une immense procession dans la ville avec les meme musiciens que la vielle. Alberto me presente à tout ses amis et en moins de deux je connais tout le quartier ! On installe de grandes tables sur la petite place en bas des escaliers et tout le monde est invité à deguster la soupe, le poulet et des droles de petites patates noires. C'est un grand moment de convivialité mais curieusement les femmes ne se parlent presque pas entre elles. Personne ne s'etonne de ma presence  mais aucune de ces femmes ne me questionnent. J'ai vraiment l'impression que les gens sont beaucoup plus silencieux et introvertis ici.

Les hommes se mettent à jouer à ce que je croyais etre la petanque au debut.En fait il lance un gros bout de moi dans un motte de boue et ils doivent reussir à eclabousser des oranges posées à còté. Les litres de vin coupés au coca s'enchainent, et tout le monde devient completement saouls. Je vois trois papis s'effondrer sur le bord de la route et s'endormir profondement, apparement c'est chose commune.
Le choc culturel est impressionant. La pauvreté est veritablement là et on se saoule à chaque fin de semaine pour oublier ou parce qu'il n'y a peut-ètre que ca à faire...je ne sais plus trop quoi en penser....mème si j'ai passé une super journée.

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